Exorciser le CRFPA, examen du démon - Le guide ultime des révisions

    Selon certains, avoir envie de devenir avocat c'est déjà avoir fait le moitié du chemin. Ainsi, comme ne l'indique pas ce titre racoleur, je livre mon parcours qui n'a aucune vocation à exemplarité. Mais puisse-t-il en inspirer certains pour arpenter sereinement ce qu'il reste du chemin.

Quelques considérations générales sur l’examen

    À chaud, un mois après l’avoir passé, je dirais que c’est un examen à faible teneur intellectuelle. Concrètement, je m'attendais à de grosses interros et je n’ai pas été déçu. Pour le réussir, il conviendrait de s'armer de l'arsenal suivant : une méthodologie soignée qui force le respect (la prise d'automatismes est la clé), une maitrise du cours qui comprend la mémorisation des grandes lignes, et de toutes les subtilités jurisprudentielles (impliquant ainsi de pouvoir réciter de tête le plan de son cours, et d'en avoir une vision globale), et surtout un état psychologique positif, voire enjoué (facile à dire, mais ça me semble compter au moins pour moitié dans le succès). 

Voici mon avis sur les questions courantes.


Combien de temps m’a-t-il fallu pour le préparer ?

    Essentiellement, un travail sur une période courte mais pas trop

    Quatre mois à des intensités variables est un bon compromis. Mais l'examen doit résider dans notre esprit toute l'année. On peut travailler seul, ou avec une prépa semestrielle, mais sans jamais se passer de son code afin d'en maitriser l'usage à l'examen. D'ailleurs, je potassais un manuel de culture juridique dès janvier (comme celui d'Erick Maurel ou celui de Revet et Lucas). Cela permet d'entrer doucement dans les révisions. Un ouvrage d'introduction au droit ferait aussi très bien l'affaire pour revoir les fondamentaux car la L1 constitue une bonne partie du programme du grand oral. Aussi, je discerne 3 temps dans ma préparation : la phase semestrielle de mi-janvier à début mai (actualiser ses connaissances, se remettre dans le bain, se familiariser avec le vocabulaire de chaque matière) ; la phase estivale de mai à fin août ; puis la phase automnale de mi-septembre à décembre (on prend souvent une semaine d'entier repos après les écrits).


Comment évaluer son temps de préparation ?

  1. Un temps de préparation à déterminer selon son niveau et ses lacunes

    Je cumulais deux difficultés : d'abord, jusqu'au 30 avril, je travaillais à temps plein avec des horaires classiques de bureau ; aussi, j'avais fait un choix de spécialité un peu dingue selon certains (le droit civil). Certains se réfugieraient dans le droit pénal en pensant accroitre leurs chances, mais c'est légèrement plus compliqué : il faut avoir une affinité pour les matières de spécialité, voire même avoir le projet de faire carrière dans celle-ci. Il faut surtout en détenir les bases grâce aux cours de licence et de master.

        Mais les cours de licence ou de master ne suffisent pas pour réviser les matières. À mon avis, il faut aller plus loin, creuser pour cerner la moindre divergence de jurisprudence, et éplucher chaque condition prétorienne quand le régime légal est complètement flou ou un peu désuet (voir la servitude du "père de famille", la servitude non altius tollendi ou la distinction entre contrat de vente et contrat d'entreprise). Sans honte, j'affirme avoir un niveau assez inégal dans certaines matières de spécialité. Très bon dans certaines, pitoyable dans d'autres. Fin avril, j'ai donc voulu commencer par le droit des sûretés et par le droit des régimes matrimoniaux, histoire de concentrer mes forces de départ sur le plus difficile. Et je m'étais rendu compte en lisant des revues de procédure civile que j'étais complètement largué dans cette matière. J'ai donc effectué un gros travail à distinguer chaque régime sur des tableaux, à les comparer et à les rendre clairs en me les ré-appropriant. Pour mes faiblesses, il m'était donc indispensable de réécrire tout le cours pour bien l'assimiler avec figures et schémas, ce qui rend la tâche plutôt ludique.

    2. Combien de temps ai-je travaillé avant l'été ?

    De janvier à mai, on ne force pas. Je me contraignais seulement à être régulier et à travailler ne serait-ce que 15 minutes par jour. Il s’agit juste d’avoir satisfaction quotidienne d'avoir vu une partie du cours, même infime. Mais l’optimum reste selon moi une durée de travail de 2 heures par jour.

     Rétrospectivement, mon objectif était de revoir tous le droit civil avant l'été. Programme que je n'ai absolument pas tenu. Je me suis heurté à toutes les occupations dont je ne pouvais me passer. En conséquence, je me suis donc imposé un objectif dérisoire de 15 minutes par jour pour la période de mi-janvier à fin mai. Cela consistait à ficher le droit des sûretés en entrant dans le détail. Pour se faire, je m'étais astreint à commencer par le plus difficile, une règle que je me suis appliquée pendant toutes mes révisions. Reste qu’il faudrait absolument s’imposer une note de synthèse - au minimum - lors de chaque mois dès janvier. Tout du moins faut-il lire la méthode et des corrections pour s’imprégner du style et de la logique de l’exercice. Mais honnêtement, cette chose je ne l’ai jamais faite par... pure paresse.


 Quels supports de cours ?

    1. Des livres agréables et bien écrits (tout le contraire des fascicules de prépa privées)

   Je me suis emparé des manuels noirs et roses aux éditions LGDJ et... l'ai fiché en entier (ou presque). Il y a en a eu pour au moins 500 pages, donc il est évident que j'ai du survoler quelques passages. Cela m'a bien pris 50 heures. Autrement, je conseillerais deux types de supports : les manuels de l'IEJ de Paris 1 qui sont rédigés par des sommités et qui sont pensés pour le CRFPA, ainsi que les fiches de révisions du site LexisNexis

    2. Des fichiers PDF gratuits, de qualité professionnelle,  facilement et légalement accessibles

    Ces fiches de révisions élaborées par Lexis sont claires, nettes, actualisées et précises. Il suffirait presque de les apprendre par coeur pour réussir. Cela me fait penser aussi à l'excellent manuel de droit des obligations de Clément François (éditions IEJ de Paris 1). Chaque fiche Lexis comprend 50 à 120 pages par matière. Globalement, c'est la taille de notes de CM mais en bien meilleure facture. Mention honorable aussi aux manuels des éditions Enrick qui, à ma connaissance, sont plutôt pas mauvais. Il faut surtout éviter de se disperser sur des milliers de supports. Et malgré leur simplicité apparente, les fascicules de prépa seuls sont insuffisants car souvent faits à l'arrache, écrits avec le pied, et peu adaptés aux exigences du cas pratique (problématique pour 2k euros). Par ailleurs, les codes sont à saisir dès janvier, parce qu'il faut se familiariser très tôt avec l'outil qui nous servira le jour de l'examen. En effet, ouvrir ses codes un mois avant l'examen relèverait du suicide. Et, effectivement, il faudra les racheter début juillet... Rien n'empêche toutefois d'utiliser ses deux codes le jour de l'examen : l'un sera très travaillé et l'autre contiendra les arrêts récents.


Comment travailler avec son code ?

    1. Faire ressortir sur le texte de l'article : principe, conditions, effets et sanctions

    Dans la lignée de ce que je viens de suggérer, il plausible de surligner assez légèrement les anciennes éditions du code, et  ensuite de travailler davantage le visuel des codes les plus récents

    Par exemple, sur les codes du semestre, il s'agirait de n'utiliser que du jaune pour faire ressortir les conditions légales, toute comme pour repérer les arrêts les plus importants. Il s'agirait ensuite de pratiquer un code couleur plus élaboré sur les nouveaux codes de l'été. Plus précisément, on pourrait surligner en jaune les deux conditions de la violence (vice du consentement), et en rouge ses sanctions. Ou encore, en jaune les conditions de la saisine du juge de la mise en état, et les délais en vert, puis les sanctions en rouge. La manoeuvre aide à pouvoir rédiger sa majeure par automatisme, sans trop de réflexion, juste avec un coup d'oeil sur le texte (ne pas sous-estimer le pouvoir de l'automatisme qui se construit à force de répétition).

Aussi, il est recommandé d'utiliser des étiquettes collantes en plastique pour repérer les grandes parties du code. Ces étiquettes permettent de faire des liens entre des thèmes connexes

    Exemple : une étiquette verte au milieu du code sur l'article lié au contrat de bail sans écrit, puis une autre étiquette verte, au même niveau, sur la partie liée à la règle du commencement de preuve par écrit.         

    Autre exemple : un étiquette verte sur le principe directeur de l'immutabilité du litige et une autre sur le principe de concentration des moyens. Il s'agit de tout regrouper dans son code afin de pouvoir écrire sa majeure de façon limpide. Car fatalement, les révisions de cet examen ressemblent assez à une interminable session de coloriage et d'origami. 

    2. Faire ressort les subtilités : droit transitoire, les arrêts de principe et les attendus de principe

    Ne pas oublier de faire ressortir les textes surlignés en gras-italique liés au droit transitoire. Par exemple, en 2020, beaucoup se sont plantés en procédure civile parce qu'ils ont oublié de rendre bien visibles les conditions du droit ancien sur l'article 56 du CPC, alors que le droit ancien était applicable. Bref, comment reconnaitre un arrêt important ? Il fait l'objet d'une publication importante, ce qui est notamment visible avec les mentions F+B+P+R+I. Un tel arrêt tend à atténuer ou à durcir une ou plusieurs conditions d'application de la règle en faveur d'un intérêt déterminé. Aussi, pour ne rien manquer, il est toujours bon de discuter des cours avec un camarade. Cela peut aider à partager ses incompréhensions, à faire sauter des blocages, et surtout à avoir un regain d'intérêt pour son cours.

    3. Où trouver les arrêts importants ou les arrêts d'espèce qui sont bons à connaitre ?

    À ma connaissance, les fascicules d'actualité de Lexis font le travail. La connexion au site passe par vos identifiants intranet. Autrement, les fascicules de l'université de Paris 1 retracent l'historique jurisprudentiel de chaque thème avec un court commentaire en annexe. Aussi, et c'est certes le travail le plus irritant de ces révisions, il me semble important de surligner les arrêts utiles. Qu'entendre par utile ? Ce sont tout ceux qui peuvent être utilisés pour résoudre un cas pratique (lapalissade, en effet). Je conseille donc d'acheter le code Dalloz, aussi de réviser avec le site de doctrine de Dalloz puis de copier-coller, ou de saisir chaque numéro de pourvoi dans la barre principale de recherche. Il suffirait de cocher sur la gauche la case "code" pour que la page vous indique l'emplacement (numéro de note de doctrine) de l'arrêt. Par exemple : je saisis le numéro de pourvoi de l'arrêt Appietto, je coche le code civil, puis la page me donnera l'article 146 du code civil et mettra en surveillance la note numéro 3. Donc, bien faire attention aux arrêts de principe, et ne pas négliger les arrêts d'espèce. J'ai tendance à penser que plus on lit d'arrêts d'espèce, plus on est paré pour l'examen. Un arrêt de principe sert à la solution ; un arrêt d'espèce est un sujet d'examen en puissance.


Faut-il lire de la doctrine ?

    1. Pour mieux retenir

    Toujours utile, mais soulignons que l'on ne nous demande jamais de raisonner sur le sens ou la valeur de la règle, mais toujours sur son application. Cependant, il m'était très important de lire une bonne note de doctrine lorsque que mon cerveau résistait à la logique d'une règle. 

    Par exemple : pourquoi distinguer les conditions de nullités du contrat de location financière de celles du contrat de crédit-bail ? Le Professeur Deshayes traite assez efficacement de cette question dans son ouvrage sur la réforme du droit des obligations aux éditions LGDJ. Intéressant lorsqu'on sait qu'il est à cette heure chargé de rédiger les sujets d'examen. Je le répète encore aussi : la doctrine permet de lever quelques résistances et de mieux assimiler la règle grâce à une explication différente. Quoiqu'il en soit, arrivé un moment, le droit vous sortira par tous les orifices. Il est donc important de se ménager 15 minutes de lecture quotidienne sur toute autre chose. Un roman, de la philosophie, des mathématiques... Peu importe. Votre lecture anti-juridique doit être vivifiante et appeler l'évasion. 

    2. Pour acquérir le style CRFPA

    Ces lectures servent aussi à prendre le style « cas pratique » à force de lire ses codes et d'écrire des majeures. La simplicité a ici son importance : sujet, verbe, complément, puis article ou jurisprudence entre parenthèses. D'ailleurs, je ne saurais trop conseiller de lire autant que possible les revues plébiscitées comme le JCP ou le Dalloz Actu. La stratégie veut que vous ayez les mêmes lectures que les personnes qui font les sujets. Ceux-là ne font que s'inspirer de la jurisprudence. 

    3. Pour rester connecté

    Lire quelques brèves permet de se tenir au courant de la dense actualité des droits fondamentaux, et même de se sentir un peu avocat. Mieux vaut suivre sur le long court le rendu des décisions de la CEDH et du Conseil constitutionnel pour alléger considérablement son office en octobre.

    Pour les écrits, les brèves que l'on retrouve sur Lexis360, Dalloz actualité ou sur Lamyline sont parfaites pour retracer les cheminements jurisprudentiels de courants juridiques qu'on avait du mal à cerner. Personnellement, je téléchargeais les articles les plus intéressants et me les envoyait par mail pour les consulter sur téléphone dans les transports. Je faisais ça jusqu'aux derniers instants précédant les examens (le but était de rentabiliser chaque minute de 9 à 18h). Réellement, je pense que ça fait toujours bon effet d'exposer un arrêt de la Cour de cassation du 1er septembre lorsque l'examen est le 4 septembre. En somme, et telle est la grande difficulté de l'examen : on demande à des titulaires de masters de penser comme des avocats confirmés. Donc les candidats qui ont fait au préalable un long stage en cabinet ont donc un avantage indéniable. Penser comme un avocat, c'est à mon avis se jouer des délais de prescription (exemple : je préfère agir sur le fondement du dol car l'action en garantie des vices cachées est prescrite), ou des règles de preuves (exemple : je revendique le chat de mon époux en vue de la liquidation, et il devra renverser la présomption légale de communauté). C'est aussi s'assurer de la clarté du propos, et de la précision des majeures (principe, exceptions, conditions, effets et sanctions faisant chacun l'objet de sous-parties). Mais encore, il s'agirait d'envisager toutes les difficultés du cas et toutes les actions envisageables pour donner satisfaction au client. On peut s'en référer au cliché de l'avocat américain qui défendrait les intérêts d'une personne qui s'est brûlée la langue à cause d'un café en assignant absolument tout le monde : le fabricant de la machine à café, l'exploitant, l'entreprise d'entretien...

Comment rédiger ses fiches ?

    1. Des tableaux pour tout retenir

    J'ai commencé par écrire mes fiches à la main et sur feuille blanche en résumant chaque partie avant de me rendre compte que c'était bien trop long. Donc je suis passé sur la rédaction de tableaux Word. 

    Exemple : un tableau pour les sûretés personnelles et un autre pour les sûretés réelles, et dans un tableau, on trouve une colonne pour le cautionnement, une autre pour la lettre d'intention et ainsi de suite. Cette méthode me parait indispensable pour apprendre les voies d'exécutions (distinguer conditions communes et différences de régime). En gros, on fait jouer le facteur "résilience". Autrement dit, on fait ce qui nous plait, et on prend plaisir à créer ses propres supports en les rendant agréables à lire. L'avantage des tableaux est que l'on puisse avoir tout le cours sous les yeux, même lorsque l'on ne veut consulter qu'un seul thème. Grâce à un regard global, transversal, le cerveau s'habituera instinctivement à faire des liens entre les régimes, et surtout à les retenir.

   2. Des manuels vraiment didactiques

     C'est assez agréable de travailler sur un manuel clair et bien écrit comme ceux d'Aynès et Malaurie (les roses et noirs évoqués plus loin) dont les propos sont toujours assez critiques et mémorables. Ne pas non plus négliger la partie introductive du manuel pour saisir plus largement les enjeux de la matière. L'introduction étaye une vision économique, sociologique ou historique. La culture annexée au savoir théorique est pour moi quelque chose d'assez redoutable. Quoiqu'il en soit, à chacun ses préférences. Choisissez le manuel qui vous semble le mieux écrit, ou le plus illustré, le plus clair avec une belle couverture et avec une police qui vous est agréable. L'ouvrage doit vous donner envie de le consulter. Surtout, évitez de vous disperser entre les différents supports. Dès que vous aurez commencé vos fiches, dites-vous qu'elles doivent être prêtes pour juillet et que vous n'aurez plus le temps d'approfondir. Gardez aussi en tête que les fascicules ne sont que des aides-mémoires et qu'ils ne permettent en aucun cas de maitriser une matière. 

    3. Structurer ses fiches comme ses futures copies d'examen

    Les fiches doivent faire ressortir impérativement "principe, conditions, effets et sanctions". C'est nécessaire pour s'habituer à dérouler les raisonnements avec fluidité à l'examen. En effet, sur la copie d'examen, chacun de ces éléments doit faire l'objet d'une sous-partie. Ça parait superflu, mais vous gagnerez en clarté et en rigueur. Par ailleurs, la partie sanction doit contenir le régime procédural de la sanction (nullité absolue ou relative, caducité, résolution etc.), avec le délai de prescription et le titulaire de l'action, ce qui implique de savoir jongler avec les articles. Pour forcer la mémorisation et les automatismes, il est recommandé de se faire des majeures "prêtes à l'emploi". À la fin de chaque leçon révisée, il est utile d'écrire une majeure telle qu'on la dirait à l'examen. Elle doit être concise. Je préfère l'écrire sous cette forme :

  • « Le créancier peut agir en réparation sur le fondement de la responsabilité contractuelle et doit d'abord mettre en demeure le débiteur d’exécuter son obligation dans un délai raisonnable, sauf si l’inexécution est définitive (art. 1231). Ensuite, il devra prouver l’existence d’une inexécution contractuelle, donc de l’obligation enfreinte, ainsi que son intensité (art. 1231-1 du Code civil), d’un dommage qui était prévisible au jour de la conclusion du contrat (art. 1231-2 et 1231-3) et d’un lien de causalité entre ces deux premiers éléments (art. 1231-4) ».
Il m'est plus confortable de commencer par le sujet de la phrase (la partie au litige en l'occurence), d'utiliser le verbe "pouvoir" (quand bien même il n'est pas élégant en dépit des exigences du CNB) et de finir par l'article entre parenthèses. Le but est même de pouvoir réciter des majeures. Ne surtout pas se rendre dépendant du code, d'où l'importance de bien le travailler pour en absorber l'essentiel. Dites-vous cependant qu'en 2 ou 3 mois, toutes les règles auront le temps de s'ancrer dans votre esprit. Mais vous pouvez donner un coup de pouce à votre cerveau en vous exerçant à rédiger de tête, et le plus tôt possible, quelques majeures sur un coin de papier peu après les avoir lues. Je qualifierais ceci d'exercice de "mémorisation immédiate" (méthode que je ferai breveter afin de vendre des formations en ligne très chères). D'ailleurs, c'est toujours plus rassurant d'arriver à l'examen en étant capable de restituer de mémoire quelques articles du code. D'ailleurs, il ne faut jamais s'aventurer à faire des fiches sans avoir son code sous les yeux. Se familiariser avec son code, c'est la clé. Rappelons-le.

Comment organiser son travail en été ?

    1. Un rythme humainement tenable

    Je pense qu'il faut démarrer crescendo, c'est pourquoi j'ai commencé avec 5 heures par jour lors de la première quinzaine de mai, pour monter progressivement à 7, voire 10 lors de la deuxième quinzaine. Interdiction de veiller au-delà de 23 heures, alors même que la tentation est grande de passer sa soirée à remettre en forme un galop à rendre. Or, ce dogme du "tout rendre" est une aberration. J'ai préféré passer rédiger au 1 ou 2 galops de l'IEJ pour chaque matière plutôt que de m'infliger 4 galops à mettre au propre chaque semaine. Néanmoins, tout rédiger lors des 3 premières semaines de révisions (en mai ou en juin), pourquoi pas ; et on pourrait reprendre ces "rédactions totales" 3 semaines. En tout cas vous n'êtes pas là pour flatter l'oeil d'un correcteur de prépa. Il y a un océan de sujets qui vous tend les bras. J'ai donc préféré enchainer des plans détaillés, et le but est de faire toujours plus concis pour en abattre davantage, ainsi que pour devenir plus rapide.

   2. Un repos indispensable pour tenir la durée

    Trois à quatre mois de révisions, c'est long. Jamais en licence ou en master on a dû travailler aussi intensément plus de 3 semaines. Je préconise alors 2 ou 3 jours de repos total, toutes les 6 semaines. Faites-vous confiance. Si vous êtes sportif(ves), vous savez que le repos du corps aide à progresser sur le long court. Vous savez aussi que le système nerveux peut griller si on force trop ses efforts sur un temps trop long. Le danger est de ne plus pouvoir agir à cause de la fatigue. Du repos est donc indispensable, notamment si vous ressortez d’une activité à temps-plein qui terminerait fin avril. Mais encore, si vous subissez le contre-temps d'un stage ou d'un mémoire à soutenir, vous ne pourrez pas réviser intensément, mais le maitre-mot reste : la régularité (et une discipline quasi-militaire).

3. Les étapes de révisions

a) La phase pré-estivale ; des fiches prêtes avant l’été

    1- Choisir ses priorités : d’abord travailler sur ses faiblesses

    Au début des révisions (mai à mi-juin éventuellement), chaque matière doit faire l'objet d'une étude approfondie. Par exemple, une à deux, voire trois journées pour une matière de spécialité ou pour la procédure. J’ai passé beaucoup de temps à décortiquer chaque matière avant de passer à la pratique des entrainements. Ayant souhaité commencer par le plus pénible pour jouir de l’enthousiasme des début, j’ai travaillé le droit des obligations en dernier (autour de mi-juin) tout simplement parce que j'avais une certaine aisance dans cette matière. Alors prenez garde aux prépas qui insistent lourdement sur les séminaires et les galops en droit des obligations. Certes le droit des contrats tombe souvent, mais ce n’est pas le cas pour la responsabilité civile, encore moins pour le régime général des obligations. J'ai d'ailleurs vu les RC en une journée, et les RGO en 3 jours lors de cette période de « reconnaissance ». Je n'y suis revenu que quelques jours pendant le reste de l'été. En fait, c'est plus simple pour eux d'enseigner ces matières de deuxième année et cela leur donne la sensation d’être très utiles. Aussi, il est important de résister à la tentation de surdoser ses révisions sur les « oblig’ » au prétexte que c’est "prenable" et qu’on peut aisément monter à 16. On se dit que ça peut compenser une note de synthèse ratée. Or, eu égard aux coefficients, mathématiquement, ce raisonnement ne tient pas la route. Mieux vaut répartir ses forces sur la spécialité et sur la procédure. Les obligations sont votre point fort ? Soit. Travaillez-les moins et concentrez-vous sur le reste.

    2- Identifier l’anatomie de chaque matière 

Pour maitriser la spécialité et sa procédure, il « suffirait »  de maitriser son code. Il en va de même pour la procédure. Or, le code de procédure civile est assez chaotique, et la matière parait infernale. Néanmoins il est fort possible d'atteindre 16/20 en sachant identifier très rapidement la procédure en cause, la position procédurale des parties, le résultat que l'on veut atteindre, les difficultés rencontrées, les thèmes qui se rattachent à ses difficultés, tout en priorisant les majeures : on part du plus général pour aller au plus spécial. Il convient aussi de toujours se rattacher à un principe légal, voire à un principe directeur de la matière, comme le principe du contradictoire en procédure (en droit des contrats, un tel principe serait entre autres la force obligatoire du contrat). Globalement, il s'agit de deviner le barème. 

    3- Avoir conscience des exigences de l’examen

Pour les IEJ, l'objectif est clair : il faut devenir une machine à cas pratiques. On nous enjoint même à réduire notre temps au brouillon. Aucune place pour la passion. Vous êtes payés au poids et à la clarté. Plus vous écrivez, plus vous gagnez de points (d'où l'intérêt de s'entrainer à l'écriture rapide tout en restant lisible). Au jour de l’examen, on a peu de temps pour lire le sujet, le comprendre, l’assimiler et pour un faire brouillon. Je m'astreignais à faire des brouillons assez schématiques. Peu de temps aussi pour ouvrir son code non plus. On lit le sujet 2 ou 3 fois, puis on griffonne ce qui sera l’ossature du devoir, et enfin on rédige sa copie au kilomètre. À peine le temps de lever le nez, sauf pour regarder dans son code et pour s’assurer qu’on a juste.

    4- Une méthode renforcée par une rigueur presque exagérée

On vous fait des reproches sur le caractère incomplet ou évasif de votre copie ? Multipliez les sous-parties et les questions de droit. Soyez complètement maniaques. Si on manque de discipline sur le papier, exagérer le trait est un bon moyen de se faire violence. 

    Par exemple, si vous avez une question sur la rupture du contrat, vous devez envisager les 3 ou 4 sanctions les plus pertinentes de l’article 1217 du code civil. Attention, il ne faut pas se borner à invoquer 1217. Il faut toujours l’adjoindre aux textes sur la sanction choisie. Comme la résolution (1224 du code civil), sanction qui soulève bien des questions, notamment lorsque le client s’interroge sur sa validité (retenez que la demande du client cloisonne votre réflexion, sinon tout ce qui en dépassera ne sera que perte de temps). En effet, quid des conditions de forme et de fond de la mise en demeure. Est-elle nécessaire si la résolution est judiciaire ? Et si l’inexécution est définitive ? Je remarque d’ailleurs, pour avoir planché sur pas mal de sujets, que l’esprit des galops est toujours le même : identifier la règle et savoir comment elle est appliquée en jurisprudence. Il est donc rare de n’invoquer qu’un article du code, sans avoir à citer un arrêt de la Cour de cassation. Sauf peut-être à l’examen de 2020 car les sujets de chaque épreuve étaient très concis (mais à confirmer au regard du barème officiel). À mon sens, il s’agissait plus d’éprouver notre rapidité que notre réflexion. Enfin, pour être pertinent, il faut bien étayer la question de droit. Donc je n'hésitais pas à la faire aussi exhaustive que possible. 

    5- Approfondir pour n’être jamais pris au dépourvu

Ce début de révision m'a servi à voir les cours en détails. Surtout, le but est de ne jamais être surpris par un point de droit un peu bizarre, à l’image de la question de la présomption dite "irréfragable" de contribution aux charges du mariage stipulée par contrat de mariage dans le régime de séparation des biens (sujet de civil de 2019). En définitive, la méthode est toujours la même : repérer les faits pouvant prêter à conséquences juridiques, ainsi que chaque date (gare aux délais d’action et de forclusion) ; résumer les faits en ne gardant seulement que ce qui est susceptible de qualification juridique ou tout élément pouvant influer sur la solution ; introduire les demandes de la personne qui nous consulte ; annoncer un plan (exemple : « il s'agira de savoir si le contrat est formé (I), si son exécution peut être demandée (II), et les sanctions de son inexécution (III) » ) en n'oubliant pas que les demandes qui vous sont soumises bornent votre propos ; puis dérouler les différents régimes applicables en commençant par les plus vraisemblables dans chaque sous-partie (A, B...) ; chaque sous-partie devrait contenir le même sempiternel schéma "principe/condition/effet/sanction" (formant chacun un 1. 2. 3...). En effet, plus la structure est claire, moins le correcteur risque de se perdre. Il est même possible de traiter un régime en quelques phrases, sans syllogisme particulier (soit parce qu’on voulait en aborder un mais qu’on n’a pas eu le temps de le faire, soit qu’on sentait qu’il fallait évacuer un régime).  Par exemple, on pourrait exclure le dol en une phrase car, en l'espèce, il n’y a pas de manoeuvre ou de mensonge. La parcimonie est de mise cependant. Ces initiatives pour chercher le bonus ne sont récompensées que par un petit point si le régime abordé est hors barème (mais pertinent). Et surtout ne pas oublier de trancher et ne pas se retrancher derrière la fameuse "appréciation souveraine des juges du fond".


B) l’entrée en douceur dans la phase estivale ; cerner les subtilités de chaque épreuve

    1. Parfaire ses fiches sans stress inutile

Lors de l'étape que je qualifierais d'intermédiaire (mi-juin à mi-juillet), je remettais en forme mes fiches/tableaux au format Word, et y ajoutais de l'actualité. Et dans un autre fichier, je notais les particularités des méthodes de chaque matière et les difficultés auxquelles je me confrontais au fil des galops. 

    Pour préciser, en droit des régimes matrimoniaux, je notais qu'il fallait commencer par présenter le régime, sa date d'entrée en vigueur, et exposer les faits sous la forme d'une problématique à la forme affirmative (comme : « Mariée sous le régime de la communauté X depuis X, Madame F. souhaite savoir si elle peut résister à la demande du créancier qui réclame paiement au titre du contrat conclu par Monsieur F » - ensuite, les questions de qualification de la dette, de l'obligation à la dette, de la contribution à la dette etc.). Le but de cette entame de période estivale est de parfaire ses connaissances, et d'être au point sur chaque matière. Aussi, je regrette de ne pas avoir fait plus tôt cette démarche de recenser les annotations des correcteurs de l'IEJ, ainsi que la façon dont les majeures sont construites dans les corrections.

    Ainsi, cette période n’est certainement pas la bonne pour découvrir de nouveaux supports de cours. Cependant, pour quelqu’un qui n’a que juillet et août de libres, je pense qu’il est possible de bosser avec acharnement du 1er au 15 juillet pour absolument tout ficher, et accomplir un galop de l’IEJ par matière. Après un tel effort, 2 jours de repos s’imposeraient après le 15 juillet.

    2. Intégrer les exigences de l’IEJ

Je recommanderais de refaire, même rapidement, les galops de l'IEJ peu avant mi-juillet. Les enseignements de l'IEJ sont extrêmement importants car ils sont dictés par vos futurs correcteurs. Il faudrait presque apprendre par coeur toutes les corrections de l’IEJ car elles reflètent ce qu’on attend de vous, tant sur la forme que sur le fond. L’avantage des IEJ peu fréquentés est alors d’avoir un nombre assez limité de professeurs et de correcteurs. Par exemple, Avec un peu de chances, votre examinateur en procédure sera aussi votre enseignant de l’IEJ pour cette matière, si bien qu'il n'y aurait qu'à apprendre par coeur ses corrections pour lui donner l'impression de se lire à l'examen.

    3. Le choix de l’IEJ a toujours son importance 

Pour cette raison, je déconseille instamment les IEJ "usines" comme ceux de Nanterre ou de Paris 1. Ce sont de véritables abattoirs. Les candidats sont trop nombreux, ce qui les met dans des conditions d'examen déplorables (compositions dans des hangars, temps d'attentes interminables avant d'entrer en salle, WC ultra-saturés, bruits ambiants pendant les épreuves, des surveillants débordés...). Les correcteurs en sous-nombre sont également hâtés de corriger dans de brefs délais, et ils sont parfois excédés de voir des centaines de copies sales au format PDF sur leurs petits écrans mal calibrés (dématérialisation oblige). Préférez donc choisir des IEJ "familiaux" dans lesquels il n'y a pas plus de 500 candidats chaque année, comme à Cergy, Saint-Quentin, Paris-Saclay, ou Évry. Les usines présentent aussi l’inconvénient de se trouver à proximité d’écoles d’avocats aux capacités d’accueil limitées. Ainsi seront prioritaires les candidats des petits IEJ.  Pratiquez donc « l'IEJ shopping ».


C) la course dans la phase estivale ; entre entrainement massif et récitation bête et méchante

On entre à ce moment dans la fameuse étape des révisions intensives, et celle-ci est décisive. Malgré tout, rien n'empêche de ponctuer cette période d'un court séjour à l'air frais. Je suis donc parti sans remords au début du mois d'août pendant 4 jours. Cela m'a permis de récupérer de la fatigue nerveuse de l'entrée en matière à  l'IEJ.

    1. Chercher à être productif sans s'épuiser

    Après le 15 juillet, certes, le maitre-mot est productivité. Je pense qu'il faut étudier un maximum de sujets de galops jusqu'à mi-août (la dernière période serait consacrée au "par coeur"). En effet, pendant que vos camarades de prépas privées se borneront à ne faire que 4 galops par semaine, vous aurez le loisir d'en traiter et d'en corriger 2 à 3 par jour. Le début sera certainement poussif en ayant souvent l'impression d'être à côté de la plaque. Le changement de rythme et le trop-plein d'informations donnera la sensation de ne rien retenir. Donc, comme en toutes choses, la modération et la patience s'imposent.

    2. Des coupures salvatrices

Je suis parti en Italie du 2 au 5 août et je suis persuadé que cette incartade m'a été salvatrice. Cela m'a revigoré et littéralement relancé mes révisions en rattrapant le repos que j'avais manqué. J'ai même constaté un progrès pour la compréhension de la procédure civile, tout comme pour mes automatismes rédactionnels. Je trouvais plus facilement les thèmes et ordonnait plus facilement mes majeures. Une vraie renaissance. 


    3. S'assigner des tâches précises et pragmatiques 

            a) Bien s'imprégner des corrections

Même après le 15 juillet, j'ai continué à étiqueter et à surligner mes codes. Chronophage mais inévitable. Avant le 5 août, je me souviens que je fichais les corrections en écrivant au dos du sujet. Je ne notais que le plan du correcteur, les articles et les JP abordées. Pour moi, la rédaction des mineures ne relèvent que du pur talent, même si la façon de les formuler est toujours la même ("en l'espèce, M. X a..., ainsi il conviendra de lui conseiller de...). Toutefois, il m'a semblé que les correcteurs demandaient les arguments favorables à l'application d'une règles, les argument contre, puis de trancher. En effet, les correcteurs détestent que l'on se retranche derrière l'appréciation souveraine de la Cour de cassation. Il faut explicitement raisonner sur les chances de succès de l'action, comme on le ferait si on conseillait un ami (très bonne méthode pour apprendre ses cours en les récitant de tête).  En bref, il faut être convaincant. Durée du fichage d'une correction : 30 à 45 minutes.

            b) Des sujets, et toujours plus de sujets...

Après le 5 août, même procédé mais je préférais lire les corrections en diagonale juste pour voir si mon approche était la bonne. Ces corrections me prenaient entre 5 et 10 minutes. De cette façon, autant dire que j'enchainais les sujets et pouvais en faire 5 à 7 dans la journée. Ce qui n'est pas sans être épuisant, parce qu'en bon masochiste je me chronométrais. Cela aide d'autant plus à la discipline. Donc ici, on fait dans l'abattage et on travaille massivement les sujets de galop. C'est ainsi que j'ai pu remonter jusqu'à quelques sujets de 2017. 

    Donc jusqu'au 15 août, j'ai tâché de raccourcir mon temps au brouillon. Au lieu des 15 minutes initiales, je tentais de finaliser les brouillons en 5 minutes. Plus précisément, je surlignais les dates en vert, et les faits en jaune. Dans la marge, j'inscrivais les articles. Ainsi, les corrections-types des IEJ et prépas (mais pas n'importe lesquelles), me paraissent importantes. Il faut s'en imprégner et presque les apprendre "par coeur" de sorte à être à l'aise. Je conseille vivement les sujets de Paris I, de Paris II et, éventuellement ceux de Pré-Barreau et de Capavocat. Et pour chaque correction, il faut au moins en retenir les structures. Une technique consiste à revoir très régulièrement les corrections vues précédemment, aussi de tenter de les réciter immédiatement après les avoir faites, et surtout de s'en rappeler au coucher afin de les imprimer.

        c) L'auto-correction et la récitation pour se rassurer

    Ensuite, entre mi-août et le début des examens, je me suis remis à apprendre par coeur mes fiches (lectures puis récitation des leçons, partie après partie). Je rédigeais aussi des galops en entier pour me réhabituer à l'écriture sans abréviation C'était l'occasion de prendre une demi-journée pour travailler une annale dans les conditions de l'examen et de s'auto-évaluer pour mettre le doigt sur ses insuffisances. Je me suis donc imposé de refaire en conditions réelles tous les examens de la dernière session. J'ai ensuite repris le barème et je me notais honnêtement. J'oscillais ainsi entre 12 et 14 sur chaque exercice, et je n'étais pas loin de la vérité. En définitive, un des meilleurs conseils que je puisse donc donner : se rattacher constamment à la réalité, raisonner, écrire, et créer chaque jour des syllogismes. Autrement dit, faire chaque jour tout ce qui nous sera demandé à l'examen, thème après thème.

    d) Cibler ses insuffisances pour trouver la perfection

    Les faiblesses persistantes peuvent être diverses. Il peut s'agir de phrases trop longues, de mauvais ordres de priorité, de faits insuffisamment qualifiés... D'ailleurs, il n'est jamais superflu de consacrer une grande partie dédiée à la qualification de l'acte ou du fait juridique. Commencer par cela est souvent nécessaire. Et j'avais tendance à oublier d'aborder les façons de prouver l'existence du droit invoqué. Le problème des cas d'école... Mais au regard des annales, je me suis bien rendu compte que la logique est la même. Ce sont des récits plus ou moins courts qui portent sur des thèmes généraux. Les majeures à aborder sont souvent celles qui font l'objet d'un contentieux nourri (l'erreur sur la rentabilité d'une opération économique, par exemple), ou qui ont fait l'objet d'arrêts marquants rendus l'année de l'examen (voir la question de l'effet dévolutif de "l'appel total"). D'où l'intérêt de suivre assidument l'actualité. De toute manière, en étudiant son cours, on se fera souvent des remarques type "cette question-là peut tomber".  Il est donc possible d'anticiper au moins partiellement le sujet au regard de ce que je viens d'évoquer. Toutefois, il faut retenir que le sujet peut porter sur une ou plusieurs questions concernant un point de droit légèrement esseulé, à l'image du cumul des responsabilités si les articles 1245 du code civil tendent à s'appliquer. 


    2. Renouer avec son rythme naturel

Sur cette période, je consacrais en matinée 3 à 4 heures pour une matière. En journée, 5 à 7 heures pour une autre. J'alternais, par exemple : un jour "procédure/spécialité", et un autre "obligation/spécialité". Le dernier jour de la semaine était consacré à la note de synthèse, soit un examen de 5 heures dans les conditions de l'examen, puis je sortais. Dans le train ou le soir, je lisais attentivement la correction du sujet de la note  de synthèse (surlignage, extraction du plan, analyse de sa formulation, la façon dont il est équilibré, celle dont s'enchainent les informations, et par quels mots de liaisons, si la correction est rédigée...). Chacun sa manière d'étudier une correction. Autant dire qu'à la fin du mois d'août, je n'avais plus le temps, ni l'envie de faire une note entière. Les 15 derniers jours de révisions, je faisais seulement les étapes de lectures et de synthèse des documents.

    De façon générale, sur mes 6 jours de révisions, je passais l'équivalent de 2 journées sur la procédure, 3 sur la spécialité, 1 sur les obligations et une demi-journée sur la note de synthèse. J'évitais de travailler le dimanche. Mais je ne m'empêchais pas de consulter les revues en fin de semaine, voire même après la note de synthèse (quand bien même cet exercice aspirait mon âme et toutes mes facultés cognitives). Donc aucun planning pré-défini. Seulement un programme hebdomadaire approximatif. Le dimanche, je réfléchissais à ce que je devrais voir en priorité, et sur quelles faiblesses que je travaillerais. Quoiqu'il en soit, s'il est difficile de se lever à 6 heures tous les jours lorsqu'on en n'a pas l'envie ni l'habitude, mieux vaut se lever à 8 heures pour respecter sa nature. Lors des partiels de licence et de master, si on était habitué à travailler 12 heures par jour pendant 14 jours, il est plutôt question de travailler 7 à 8 heures quotidiennement lors des révisions du CRFPA. Il absolument tenir compte de cette réalité pour ne pas exploser au vol. Peu importe l'heure du lever, tant qu'on effectue son minimum horaire. Mais évitons quand même de se lever à 12 heures, d'une part parce que ça impliquerait de travailler lors du pic de chaleur de la journée ; d'autre part parce que je vois mal comment on peut être au summum de ses capacités si on va à l'encontre de son système circadien.

    3. Un mental mis à l'épreuve

    Tenir cette période n'est pas si difficile si on veut vraiment embrasser cette profession. On peut aussi trouver la force de tenir si on veut tout simplement réussir cet examen pour estime personnel. L'orgueil est un bon moteur. En tout cas, tenir un programme pendant tout un été reste une performance qui en dira long sur votre force de caractère. Alors en toute logique, après cela, vous ne pouvez que réussir (à condition de ne pas s'égarer dans des choses de peu d'importances, et ce guide est là pour éviter cela).

    4. Bien résister dans un environnement peu favorable

    Incroyable mais vrai, en été il fait chaud. Tout le monde publie des photos de plage et proposent des sorties. Pour surmonter les plus grandes difficultés, il faudrait investir dès à présent dans un climatiseur ou dans un ventilateur puissant. Contre l'appel de la société, il faudrait aussi s'habituer au mode avion de son téléphone pour ne le désactiver, éventuellement, qu'au déjeuner ou en soirée. Toute sortie nocturne peut casser le rythme du sommeil, or aucune nuit blanche n'est permise pendant le mois de juillet. Ainsi, une discipline de fer s'imposait pour moi et les mécontents pouvaient tout simplement aller se faire empailler. Ce n'était donc pas le moment de s'investir émotionnellement dans un début de relation, ou de se brouiller avec son partenaire. Il faut se débarrasser du moindre boulet qui vous plombe le moral. Car, justement, les révisions n'auront pas un très bon effet sur votre taux de sérotonine. Donc tout élément perturbateur doit dégager aussi fort que possible. Il est donc fondamental de se ménager un rituel et une activité qui nous plait. Je prenais alors goût à certains divertissements qui mettent de bonne humeur. Je révisais avec de long albums instrumentaux de sorte à rester stimulé toute la journée. Le silence total ne me réussissait pas. De temps à autre, je lançais un podcast, si possible, avec des personnes inspirantes. 

    5. La clé de la motivation : visualiser la réussite et la personne que l'on veut devenir

    Je visualisais simplement le professionnel que je voudrais être tout en gardant à l'esprit la voie que j'aimerais éviter comme une carrière infantilisante et ennuyeuse en banque-assurance. Se visualiser dans la victoire est la techniques des champions.

    D'ailleurs, la motivation renvoie plus généralement à la question de l'état d'esprit. On est toujours très motivés au début, mais le cerveau s'accommode mal de la répétition. Donc il faut casser sa routine. Parfois, il s'agira de commencer à 13h pour finir à 21h. Il est intéressant de se laisser quartier libre quelques matins pour faire tout autre chose. Et avec la chaleur, il m'arrivait même de travailler de 7 à 13h puis de revenir de 19 à 21h. 

    Encore une fois, aucun problème tant que les 7 heures sont faites. Aucune règle mathématique ne permet de calculer le nombre d'heures nécessaire au succès. La règle des 10 000 heures est pour moi une fumisterie. Je me contentais de faire le maximum de ce qui était humainement tenable sur la durée. Donc je préfère plutôt parler de détermination que de motivation. D'expérience, la motivation est éphémère, et à un certain moment la discipline devra alors prendre le relai. 

    6. Une confiance qui se construira brique après brique

    Vouloir s'infliger un été de révisions nécessite une grande volonté de s'élever, ou de se maintenir, intellectuellement et/ou socialement. L'essentiel est de garder l'état d'esprit du conquérant. Et pour forcer leur discipline, certains ont la bonne idée de publier sur les réseaux leur programme de la journée. Cela permettrait d'obtenir des encouragements, mais surtout de s'engager à respecter le programme. En bref, visualisez toujours la victoire. De toute façon, votre confiance, votre estime de soi et votre force de volonté vont augmenter grâce à la simple étude. Ça peut paraitre étrange, mais plus on lit un cours plus on en saisit l'intérêt. Toutefois, il ne faut pas s'attendre à tout maitriser avant la première quinzaine d'août. 

    L'essentiel est de tout lire au moins une fois, et de tout comprendre, ainsi que de pouvoir repérer assez rapidement la règle dans le code. La difficulté majeure de l'examen réside dans l'exigence de rapidité. C'est ainsi que le gros de la sélection est faite. Aussi, au sortir de l'examen, on aura forcément une certaine idée de ce qu'on a réussi ou raté. Cependant, vu que l'on vise la perfection, le "tout bon", on sera nécessairement insatisfait de nos prestations à la sortie de la salle d'examen. On pensera et repensera à des détails que l'on aurait mal dit, ou mal étayé. Peut-être même que l'on s'est trompé de majeure à un moment... Si le doute persiste, il serait de bon de jeter un bref coup d'oeil sur les réseaux sociaux pour connaitre l'avis général. Et là encore d'expérience, la majorité a souvent raison.

    7. L'incroyable pouvoir de l'auto-évaluation

    Après l'examen, qu'advienne que pourra. Après un examen de droit des obligations dont le sujet prête à controverse, il n'est pas question de passer 4 heures le soir à glaner sur internet tous les commentaires d'autres candidats qui vous donneraient raison. Il faut passer à la suite. Il faut dès le trajet du retour se concentrer sur l'examen de spécialité qui aura lieu le lendemain. Il faut être imperturbable.

    De toute façon, si on finit son devoir dans les temps, et qu'on a bien lu le sujet alors on est nécessairement dans les clous. Les 3 ou 4 mois de travail sérieux se refléteront sur la copie. Le succès se construit brique après brique. Pendant l'été, il s'agit de réviser de façon pragmatique, de créer ses majeures et de connaitre son code. Et la semaine avant l'examen, hors de question de s'arrêter. Lever le pied oui, mais pas d'arrêt total. C'est le meilleur moyen de se perdre en route, ou de paniquer à cause de la culpabilité. 

    D) la semaine de l'examen : comme des partiels, mais en septembre

    Concrètement, c'est quoi un examen du CRFPA ? Juste un long cas pratique qu'il faut finir dans les temps après en avoir trouvé les problèmes. À chacun de ces problèmes son thème. Aucune place pour le génie, ni pour la littérature ou les pensées doctrinales. C'est surtout du "par coeur". L'essentiel de la réflexion a été faite en amont pendant les révisions, si bien qu'à l'examen il n'est plus question de s'interroger sur la ratio legis de telle ou telle règle. Une fois le sujet distribué, c'est lecture du sujet et rédaction. On a légèrement le temps de regarder dans son code, mais il ne faut pas y passer plus de 10 minutes. Mon temps était réparti comme suit : 10 à 20 minutes de brouillon pour repérer faits et dates, et surtout pour élaborer l'ossature de mon devoir. J'écrivais a minima les articles envisageables dans les marges du sujet.

    Or, tout cela se fera automatiquement. La méthode et les connaissances dûment travaillées rejailliront. À condition toutefois de bien se détendre avant d'entrer dans la salle de l'examen (interdiction de relire ses fiches ou d'avoir des pensées limitantes). Juste avant l'examen, mieux vaut s'envoyer un bon plat de pâtes et un expresso avant de prendre le soleil en écoutant de la musique. Il est également fondamental de prévoir des bouchons d'oreilles pour être dans sa bulle lors de l'examen.

    Bien que je ne me sois pas senti à 100% (plutôt à 70-80%),  j'étais dans un état physique et physiologique plutôt acceptable grâce au sport. Pendant l'été, j'ai seulement tâché de ne pas forcer sur les efforts physiques malgré la frustration d'un quotidien monotone. Il s'agit de préserver son système nerveux. Il faut garder à l'idée que 3 mois pour réviser, c'est suffisant. D'ailleurs, grâce aux partiels de licence et master, on sait que l'on peut en faire beaucoup en 2 semaines de révisions. Peu avant les examens, il faut lever le pied, se détendre un peu, et se fermer aux lamentations des pessimistes.

Que faire si on n'est pas à l'aise en note de synthèse ?

    C'est aussi mon cas, et je n'ai pas de remède à cela. Je dirais  seulement qu'il faut compter sur ses habitudes acquises au bout de 5, 6, 7 entrainements ou plus. Il ne faut surtout pas changer de méthode le jour de l'examen. À vrai dire, c'est surtout un exercice de forme. Je me disais que si la copie est propre, claire, avec une bonne calligraphie, tout en reflétant le dossier, c'est au moins un 10/20 assuré. En réalité, ce n'est pas si simple et on peut très bien se planter même si la copie a été écrite avec la calligraphie de Voltaire. Aussi, il ne faut pas oublier de consulter le verso du sommaire, car des documents peuvent s'y trouver.

    Ne surtout pas manquer de se relire, même en accéléré et en 2 minutes minimum, afin d'ajouter les pluriels, virgules et les accents omis. S'il manque des documents cités, on peut toujours les glisser dans une phrase. Par ailleurs, souligner ses titres fait assez bon effet, et donne l'illusion de la rigueur (comme pour toute copie de cet examen d'ailleurs)

    La note de synthèse est l'épreuve la plus scolaire et la moins pertinente de cet examen. Elle éprouve seulement notre docilité protocolaire et notre faculté à élaborer des plans avec de jolis titres. Donc pour la méthode je ne peux que renvoyer au livre de Sylvain Chatry. Parce qu'autrement, ma méthode pour m'en sortir et arracher le 10 n'a rien d'académique : pas d'ordre de lecture (ça me semble être une véritable perte de temps) ; ne pas tout lire, et ne lire que ce qui est intimement lié au titre du sujet ; surtout résumer chaque document au brouillon en répondant à ces deux questions : de quoi parle ce document ? qu'est-ce que ça dit du sujet ? La ligne de brouillon dédiée au document devrait selon moi recenser son année, sa provenance globale (doctrine, presse, loi...), le droit pur contenu et son thème. Déceler le thème après lecture permet de faire des connexions avec d'autres documents et de faire ressortir un plan.

    Enfin, j'ai eu tendance à lire et à décortiquer un grand nombre de notes de synthèses toutes faites (quelles formes de phrases, quel ton, quel rythme dans le phrasé, quel degré de synthèse de l'information...). Je me aussi suis constitué une banque de plans et de titres, mais en les regroupant selon la forme et la nature du sujet (exemples : un plan descriptif pour la réforme de la responsabilité civile ; un plan chronologique pour la lutte contre la corruption si le dossier le suggère etc.)

    Attention, un écueil à éviter avec cette méthode : il ne faut  surtout pas tenter d'imposer un plan tout fait à une note. Chaque note à ses spécificités et ses thèmes propres. Il n’est pas rare que le plan apparaisse du fait que 25% des documents peuvent former une des 4 sous-parties (quatre quarts des documents pouvant donner quatre sous-parties). Ainsi les thèmes devront être rassemblés en deux grandes parties. Ces dichotomies (I/ et II) forment généralement des plans bien bateaux du type : principe/exception, principe/application, droit positif/prospective, condition/sanction, droit national/droit international, intérêt public/intérêts privés... Autant de plan-modèles à recenser. Je tâchais toujours de faire que le titre reflète le sujet, jusqu’à même le rappeler de façon un peu artificielle. Par exemple : « le commerce de l’industrie » donnerait I/ une règlementation pénale préservant l’intérêt général et II/ une règlementation administrative sauvegardant les intérêts privés. À ce jour, je n'ai pas eu accès à la correction mais un tel plan aurait valu 10/20. En effet, des remarques de correcteurs ont fuité et certains ont raillé cette approche car peu originale. Mais face à un sujet aussi inconfortable pour un civiliste peu aux faits de ces questions, cette approche permettrait de sauver les meubles. Aussi, pour le confort du correcteur, et pour s'assurer de l'enchainement logique du développement, on peut subdiviser à nouveau chaque sous-partie. Comme ceci, on donne aussi l'illusion de la rigueur.

Comment être en pleine possession de ses moyens à l'arrivée ?

    1. Jauger son niveau de fatigue

 L’essentiel est d’évaluer constamment son état de fatigue et de couper totalement en cas de difficultés persistantes à lire ou à se concentrer. L’état de somnolence en pleine journée est un bon indicateur. Pour atténuer la fatigue, je conseille alors d'enchaîner les réveils naturels, sans sonneries (autrement dit, faire des "grasses matinées"), et surtout de couper avec le café ou avec tout autre stimulant pendant les jours de repos (guronzon, ginseng etc.). Le cerveau doit se régénérer nerveusement, car il prend plutôt cher à chaque fois qu’il doit produire un effort sur un galop d’essai (mobilisation rapide des connaissances, rédaction d’un plan et formulation de majeures sous pression du temps). Une logique relativement agressive pour les neurones.

    2. Moins de fatigue, plus de confiance et moins de stress

    Lors des jours de repos, le cerveau doit aussi s’habituer à fonctionner sans stimulants. Comme évoqué, le meilleur plan consisterait à partir 3/4 jours en voyage non loin (quelque part à maximum 2 heures d’avion). C'est le meilleur moyen de résister à la tentation d'ouvrir à ses cours pendant le repos et de se régénérer en découvrant de nouvelles choses en voyage. On en revient que plus efficace, et on passe même un nouveau palier de progression. Pourquoi ? Je n'en ai pas la certitude, mais possiblement parce que le cerveau a pu traiter les informations qu'il n'a pu complètement digérer. D'où l'intérêt de ne jamais se priver de sommeil durant les mois de préparation.

La prépa est-elle indispensable ?

    1. Quitte à choisir, autant faire comme tout le monde

     La majorité des personnes dira qu'elle n'est pas indispensable, mais admettons qu'elle a tendance à rassurer. Elle permet d'évaluer son niveau et d'avoir accès à de l'actualité et à de la méthodologie. Mais laquelle est la meilleure ? Pour les prix proposé, je suis tenté de dire... aucune (mais mon jugement est quand même soumis à un léger biais politique). Donc quitte à répondre, je conseillerais Pré-Barreau car tout le monde opte pour cette prépa qui a pignon sur rue et qui respire le formatage. De toute façon au CRFPA l'originalité ne paye pas. Il y a aussi des solutions moins onéreuses, mais j'y reviendrai.

    2. Des solutions peu coûteuses et plus rentables

    En effet, les classes privées préparatoires ont la fâcheuse tendance à surestimer leur importance. À mon avis, 2 000 euros pour des fascicules et des corrections faites à l'arrache sur des sujets infaisables en 3 heures me semble excessif. On va croire que je suis sponsorisé par les cours de Paris 1, mais tant pis : c'est la seule à proposer des sujets intuitifs et très proches de ce qui est attendu à l'examen. Une bonne solution serait de la choisir à distance en complément de son IEJ (je déconseille toutefois fortement de passer l'examen à l'IEJ de Paris 1 : en 2019, c'était 3 500 candidats pour 1 830 inscrits à l'EFB, sans compter les autres IEJ). 

    3. La prépa, un énième commerce qui joue sur les peurs...

    Sans en désigner aucune, je dirais qu'elle vous vendent globalement des séminaires en vidéos comme si elles avaient réinventé l'enseignement, alors que tout est dans les livres. Force est de constater que l'écrasante majorité des intervenants aux prépas privées sont des doctorants qui n'ont jamais passé de concours. Ils tireraient leur légitimité de leur expertise juridique, mais à mon sens ce n'est pas suffisant. Et encore, 2 000 euros pour être sous-noté, nous ensevelir de galops, et nous miner le moral relèverait presque de l'escroquerie (alors qu'on n'est pas venu ici pour souffrir, ok ?).

    Les prépas basiques vous donnent l'impression d'être obligé de rendre tous les galops pour réussir. Cependant, les galops ne sont que des prétextes pour vous faire un cours. Or, une bonne prépa sait les points de droit litigieux et controversés de telle ou telle matière et vous y sensibilise. Elle discipline l'étudiant qui aime travailler dans un temps court, sous la pression (notamment pour un temps de préparation de 2 mois lorsqu'on était pris par une autre activité). Personnellement, le stress me fatigue, et j'apprends moins bien en étant émoussé par un rythme effréné. 
  
    Mais encore, une prépa décente connait les récurrences et les questions fréquentes. Elle vous dit qu'il faut faire un brouillon le plus rapidement possible (par exemple, trouver en la structure d'une consultation en 15 minutes, tout comme les articles à invoquer).

    4. L'essentiel : travailler en situation réelle

    Il était important pour moi de travailler au brouillon pour me concentrer sur le fond et de ne surtout pas me triturer l'esprit pour la forme. Je voulais abattre un maximum de brouillon en améliorant sans cesse ma rapidité et ma capacité à le détailler, tout en restant assez clair

    En effet, le brouillon sert à trouver l'angle d'attaque, et surtout à structurer du récit. J'ai travaillé le ton de ma rédaction, mon style et mes tournures de phrases trois semaines avant l'examen. Toutefois, j'estime qu'il faut se forcer à tout rédiger dès le début de l'IEJ (en mai/juin), et prendre tout le temps nécessaire pour cela avant de se concentrer sur le fond en juillet-août. Donc tout au début, il n'est pas aberrant de consacrer 6-8 heures aux premières notes de synthèse, voire même 10 heures aux premiers galops. Lorsque l'on a perdu l'habitude, la rédaction est un exercice douloureux lors duquel on se torture pour trouver le mot juste et la phrase la plus claire. Il faut se livrer en quelque sorte à un entrainement sportif. Je n'ai pas hésité à revoir mes copies de galops, encore et encore, avec le même souci : faire plus clair et plus court, mais sans perdre en structure.

    Cet exercice constitue le socle de révisions que l'on qualifiera "d'intensives". C'est donc très tôt qu'il faut s'habituer à respecter les marges pour débuter un paragraphe, à penser aux chapeaux introductifs, aux transitions de fin de partie, aux sauts de ligne entre chaque étape du syllogisme etc. (cf : le texte que vous lisez en ce moment - soit le résultat d'un long formatage). Par conséquent, les paragraphes énormes et les syllogismes "obèses" sont à proscrire (mieux vaut procéder "condition par condition" : chaque condition formera une sous-partie, sous réserve qu'il s'agisse d'une condition dont l'application est discutable, car il serait inutile de tout développer). De toutes manières, prépa ou IEJ seul, il n'est pas nécessaire de se forcer à tout rendre tant que l'on n'a pas assimilé les fondamentaux du programme. Et c'est le conseil le plus important que je puisse donner : mieux vaut passer du temps à lever les parts d'ombre que de passer 7 heures à rédiger un galop sur une matière que l'on maitrise déjà. Tout rendre signifie tout rédiger, et tout rédiger, c'est se fatiguer inutilement. Ainsi, il est plus intéressant de passer 7 heures à produire des brouillons sur 3 sujets de galops que vous aurez dûment siphonné ici et là. 

    Néanmoins, seul point favorable que j'accorderais aux structures privées : leur flair pour déceler les sujets de note de synthèse, ainsi que leur efficacité dans la préparation au grand oral. Sur ces points, elles font l'affaire parce qu'elles ont plus de 10 ans de recul sur un examen assez peu original et dont l'esprit n'a aucune vocation à changer. Quel est cet esprit ? C'est imposer la rapidité dans les rédaction, dans la restitution des connaissances, dans le repérage des thèmes à aborder et une application stricte de la méthode

    Par exemple : identifier que telle question porte sur les vices du consentement, donc aborder ici un à un (dans un même grande partie) le dol, l'erreur, la violence et l'obligation pré-contractuelle d'information. Il m'est arrivé de traiter des questions sans syllogisme en quelques lignes. Ce n'est pas forcément apprécié, et c'est même assez peu recommandé parce que cela dénote une mauvaise gestion de son temps. Mais nécessité fait loi et cela peut permettre de gratter 1 point sur 3 si on est à court de temps. Pour illustrer, mon maigre 10/20 en droit des obligations atteste bien que j'ai un peu négligé la matière et que sa maitrise n'était pas totale. Ainsi, cette note reflète bien mes hésitations, et peut-être que j'aurais mieux fait de lire absolument toutes les petites notes de doctrine sous les articles, voire même d'étudier davantage d'arrêts d'espèce. Quoiqu'il en soit, il ne faut attendre d'une prépa qu'elle nous rassure. Elle est là pour offrir les sujets les plus compliqués possibles pour préparer au pire à l'examen. Cela part d'une bonne attention, mais cette approche peut juste détruire une estime de soi de sorte qu'on se dise : "bon, j'y vais sans jamais avoir eu plus de 12/20 aux galops".  En effet, en prépa les notes ne décollent pas. Mais en fin de course on peut se rassurer en accusant d'une vraie progression, comme passer de 6 à 10 en note de synthèse ou de 10-14. En résumé, pour ces écrits, il serait presque suffisant de lire et de relire son code avec de bons manuels explicatifs, sans même avoir besoin d'écrire des centaines de pages de fiche, ni même sacrifier tous ses loisirs. L'important est de travailler sur le plus de sujets possibles, et dans un temps psychologiquement soutenable.

Quid du grand oral

    Mon retour d'expérience sur le grand oral nécessiterait 6 589 mots de plus, mais je dirais juste que c'est un examen hybride entre le partiel de libertés-publiques et le concours de culture générale. Toujours le même principe de mon point de vue : il faut recenser tous les sujets de l'IEJ et faire une fiche avec plan d'examen pour chacun d'eux. Il s'agit en somme de se pré-fabriquer des brouillons d'examen qui rejailleront dans notre esprit au moment de composer. Car une heure de préparation c'est court, et je me bornais donc à 15 minutes pour mobiliser mes connaissances avant d'embrayer sur une rédaction au kilomètre de mon plan détaillé. Cela donnait 6/8 pages de brouillon écrits en très gros (possiblement moins selon votre maitrise du sujet et votre capacité à improviser à l'oral sans trop de notes). Pour le préparer, il faut là aussi, je pense, se parer de peu de support de révision. Ma préférence pour le travail de fond va au Cabrillac sans lequel j'aurais calé sur mon sujet d'examen sur le droit communautaire, mais on peut à juste titre le trouver indigeste. Aussi, à l'évidence, le Code des Droits fondamentaux est un indispensable qui fait consensus. Pour la culture juridique, je choisis le livre d'Erick Maurel. Coûteux mais ultra-rentable. Même remarque pour celui de Fanny Cornette sur l'examen d'anglais afin de trouver un bon lexique juridique et des synthèses sur les actualités de l'année. Pour les libertés publiques, je me suis servi du manuel de Roseline Letteron. Court, efficace et bien actualisé, il est complètement adapté aux exigences de l'examen. Il faut aussi compter sur les incontournables recueils que sont les "Soldini" et "Oberdoff". Il conviendra d'en choisir un (le Soldini est plus pratique mais moins complet), le surligner et l'étiqueter. Tout comme pour un code. Le but est de retrouver assez facilement les grandes notions et les idées fortes de chaque texte. Étant entendu que, d'après les IEJ, l'examen consiste à identifier les possibles points de bascule entre une certaine liberté et sa restriction (quid de l'étendue du principe et de la légitimité de l'exception que constitue la restriction). Globalement, la méthode de l'exposé est calquée sur celle de la dissertation. 

   En fin de parcours, j'ai eu la sensation que les notes de l'examen reflétaient assez fidèlement le temps que j'avais passé sur chaque matière, tout comme mon intérêt pour chacune d'entre elles. Alors à moins d'avoir bâclé son devoir, commis un hors sujet, ou rendu quelque chose de très inachevé, tout se sera bien passé a priori. Il "suffira" d'avoir été très scolaire, et bien organisé.


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