Harry Potter, ni héros, ni protagoniste

Cette considération n'a rien d'original, mais je la ferai mienne pour démontrer méthodiquement que Harry Potter est en réalité… une véritable merguez.

« Personnage principal » pour les seuls besoins du récit

Forêt interdite, petites créatures magiques, voitures volantes et sortilèges colorés… tout ceci forme l'univers de Harry Potter ; et pour cette raison, ce monde a un charme fou. Mais pour l'explorer, l’on doit suivre le PNJ ultime. Simple négligence de l’autrice ou idée de génie ?

Commençons par dire que Potter est au service de l’intrigue pour donner à connaître des personnalités autrement plus complexes. Et ces personnalités auront des développements intéressants, à l’image de Ron Wesley qui passera du statut de tocard passif-agressif  à celui de combattant affirmé ; à l’instar aussi de Hermione qui finira d’être une imbuvable fayote, pour incarner la résistance à l'oppression, ou une véritable Simone Weil avec des compétences martiales. D’ailleurs, c’est bien Hermione qui créera l'Armée de Dumbledore, pas Harry "The Chosen One" Potter. L’hurluberlu ne serait même pas fichu de collecter les cotisations.

    Une personnalité fade et peu engageante

Certes, Hermione est hautement « premier degré », mais Harry est quant à lui une sacrée porte de prison. Froid, sans humour, presque atone et pas très malin, son hobby (et non pas son Dobbie) et de foncer droit vers le danger. Toutefois, parce qu’il a la casquette du héros, son goût du risque s’apparenterait à de la bravoure. Or, si Harry est si hardi, c'est pour que le récit s’enchaîne. Plus il se met en danger, plus l’action se joue, plus les intrigues se dénouent. Ainsi, aussi simplet soit-il, lui sont prêtées des vertus somme toute assez banales en littérature, comme le courage ou la loyauté.

Harry demeurera toutefois la victime perpétuelle de son destin, trop marqué par son orphelinat. Jamais il ne prendra conscience de son potentiel tenant au succès lointain d’avoir mis en échec le mal incarné, et s'en être sorti avec une simple cicatrice en forme d'éclair sur la caboche. Or, il ne gagnera jamais le charisme qui siérait à sa popularité de naissance. Dans les faits, toute l'assurance reviendra à Hermione. Peut-être un biais tenant à ce que J.K Rowling soit auteure... Je soulève juste l'hypothèse.

    Une évolution de personnage moins qu’insignifiante

Fort de son léger goût pour la bagarre, Harry se bornera à rêver d’entrer dans les forces de l'ordre. Mais - sauf le respect dû à la police - après 7 tomes, on espérait pour le personnage éponyme meilleure perspective que de finir à la DGSI des sorciers.

En définitive, la seule victoire d'Harry Potter sera de se caser avec Ginny. Et malgré cela, le final reste insatisfaisant. Pas parce que Ginny est rousse, mais parce qu'elle était la soeur du « meilleur ami ». Autant dire que Potter avait un boulevard. Et Hermione alors ? Tout simplement hors de sa portée. Autre occurence de ce que Harry Potter est un personnage complètement au ras du sol.

Sauf Harry Potter, tous des héros  ; en particulier ce personnage...

Kingsley Shacklebolt suinte le style, Sirius Black est multirécidiviste et le professeur Lupin est un majestueux loup garou. Autant dire que Harry Potter n’est qu’un mulot dans la fosse aux lions.

    Le deus ex machina : un nécessaire support à un personnage faible

À juste titre, Harry Potter souffre quotidiennement du sacrifice christique de sa mère, rendant nécessaire un suivi psychologique pour trouble maniaco-dépressif.  Mais par comparaison, un Bruce Wayne endeuillé ne creuse pas le trou de la sécu, mais enseigne le K1 à quelques loubards aux fins de leur appliquer un couvre-feu non publié au Journal officiel. Donc pour compenser cette absence totale de révolte, Harry peut compter sur le pouvoir de l'amitié ; en particulier sur Ron, qui se sacrifiera notamment lors d'une partie d'échecs à grande échelle ; ou lorsqu’il pilotera un oiseau pour affronter un anaconda.

La décence consisterait également à taire la façon dont le personnage défait le Lord Fucking Voldemort : le baguette de Sureau retournera le sortilège de mort contre Jédusor car par un heureux hasard, Harry en était devenu le maitre. Comment ? Très simple. Il a suffi que Harry désarme le triste Malefoy, qui avait lui-même désarmé Dumbledore, qui avait lui-même désarmé Grindewald. Logique.

    Severus Rogue est le vrai héros de l'histoire 

« Voici l’Homme » aurait dit Pilate de Rogue. Rudoyé par ses parents, brimé par les Maraudeurs - comptant d’ailleurs James Potter - le petit Severus deviendra naturellement misanthrope. Et que devient un misanthrope solitaire mais studieux ? Enseignant. Manque de chance pour Harry, qui est pour Rogue le rappel vivant de sept ans de bizutage et d'un amour perdu.

Trop humain, Severus Rogue sera dévoré par la noirceur et cette teinte déteindra sur son apparence. Peut-être souffrait-il d’une obsession malsaine pour Lily Potter ? Mais peut-on lui reprocher de garder mémoire de la rare éclaircie dans le sombre tumulte de son enfance ?

Un tel passé fera de Rogue un héros, au sens homérique du terme. Rogue (protagoniste) aura établi le plan pour déjouer les desseins de Voldemort, pas Harry la victime patentée (personnage principal, et rien d'autre). Rogue (héros) mettra son impassibilité au service de Dumbledore pour faire double jeu auprès de Lord Voldemort (héros). Et c’est par compassion presque chrétienne qu’il achèvera un Dumbledore condamné par la bague de Gaunt, ayant tenté d’enrayer le mal de cette relique. Il se repentira alors pour avoir rejoint Jédusor après ses études.

Rogue est envieux, sentimental, tâcheron et impopulaire. C’est une personnalité complexe, ambigüe et torturée à qui rien n'a été offert. Voici l'antihéros archétypique. D’ailleurs on a tous un peu de Rogue en nous, qui - contrairement à Potter -  sait voler sans balai.









Commentaires

  1. Excellent, j'ai eu le sourire, voire même quelques rires, tout au long de ce texte très bien vu.

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    1. Merci Fred de soutenir ma passion du verbe ! C'est un sujet majeur pour ma part, et il était temps de rétablir la vérité. Ravi aussi que mes écrits vous plaisent !

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