Mon projet totalitaire pour la France
En 2022, plus personne ne croit en la démocratie. Le vote porte à la candidature des mollusques et des morues qui espèrent faire don de leurs corps à la France, alors que la science n'en même voudrait pas.
Qu’à cela ne tienne, nous avons les dirigeants que nous méritons.
D’ailleurs, nous savons que si, vous, vous étiez au pouvoir vous seriez sans doute un horrible tyran.
Ne faites pas l’innocent. Vous connaissant, vous ne toléreriez aucune conduite qui sortirait de votre petit idéal ; et il en va également de ma personne.
Donc, c'est fort de l'honnêteté que j'entretiens envers vous, et envers moi-même, que j'exposerai mon projet résolument totalitaire pour la France.
1. L'armée pour les improductifs
Tu es majeur et tu joues trop à Fortnite ? À l'armée. Souffre, cher Kevin, que « l’e-sport » n'est pas vraiment un sport. Tu envoies des messages sur Snapchat ? À l'armée. Tu te prétends expert en quelque chose sans en avoir la compétence ? À l'armée. France éternelle a besoin de protéger ses frontières.
Pendant ce service militaire, tu apprendras les métiers de la mécanique, de la soudure, de l'électrotechnique à la corne du Sahel, ou à la pointe de l'Antarctique. Cela va sans dire, on manque cruellement d'artisans, et l'avenir n'est pas dans les métiers du numérique, mais dans le génie artistique.
2. Des agréments stricts pour chaque programme audiovisuel et des entractes d'État
Parce qu'il est insupportable que la foule avale encore la soupe propagandiste de quelques milliardaires, chaque producteur de télévision soumettra à l'Administration le script de leurs émissions. Terminée la presse qui n'étudie pas ses sujets et qui recourt à des éditorialistes pour nous « expliquer le monde ». Plus de nouilles dans des caleçons, plus de twerk, ni de prank. Fini de salir le nom de femmes et d’hommes pour des parts d'audience. Et au lieu de publicités mal inspirées, nous aurons en guise d'entractes à des tableaux de Marc Chagall, des morceaux de Tchaikovsky, des vers de Verlaine... Parce que l'indécence d'un poète maudit est mieux tolérable, tant qu'elle est sublime.
3. Ériger l'Administration, et non "des" administrations
L'Etat, c'est bien trop de portes qui mènent au néant ; de couloirs guidant vers de tristes ténèbres ; de bureaux recouverts de la médiocrité et de la poussière des habitudes routinières...
Sous mon règne, tout ne sera qu'unicité et simplicité. Une demande d'acte de l'état civil ? Accessible sur la blockchain avec une clé cryptée. Enregistrer une vente immobilière ? Blockchain. Une cession de parts sociales ? Blockchain.
Par exemple, le notariat ne sera qu'un vestige de l'Ancien régime. Tous les officiers ministériels éconduits seront réorientés vers des postes de cantiniers à temps partiel. Cela leur laissera le temps de restituer les sommes qu'ils ont spoliés.
Donc, un interlocuteur unique, tel est le projet. En cas de difficulté persistante, chacun pourra s'adresser au conseiller municipal en charge des affaires administratives.
Les élus seront enfin au service de la collectivité.
4. Une justice d'élite, et non "des" élites
Les doyens des juristes de chaque chef-lieu seront réquisitionnés jusqu'à inaptitude pour rendre la Justice du peuple. Pas de petit juge tout juste sorti de l'école, pas de privilégié de naissance.
Aux magistrats malavisés s'imposera l'exil forcé, car toute injustice meurtrit la communauté, en dépit de la confiance que celle-ci voue à la Justice qui exigea que l'on dépose à ses pieds les glaives de la violence vengeresse.
Alors au diable les lourdeurs administratives. Quand il s'agira d'enregistrer une requête, deux choix s'offriront à vous : "oui", "non" et "confirmer". Plus de délais de forclusion, ni de mentions obligatoires. Que du bonheur.
Voici à peu près ce qui gangrène une démocratie. C'est-à-dire la négation du bon sens et l'ébahissement devant un idéal obscur, celui de la "représentation nationale" ; ou le fait de déléguer un pouvoir total à des mendiants, des bonimenteurs, des histrions. Car, pour diriger une peuplade d'animaux de ferme, rien de tel qu'un goret qui se fera agneau avec les forts et loup avec les faibles, dans l'espoir de devenir un bon gros pourceau que l'exercice du pouvoir aura engraissé. Or, aujourd'hui, avec ses coiffeurs et chauffeurs privés, ses conseillers trop rémunérés et ses partenariats troubles avec le secteur privé, le gouvernant s'offre une dolce vita que l'on croyait disparue depuis la révolution de Février. En cela, l'esprit du politique est déformé, captif et claustré dans une forme de satisfaction de soi ; et l'offre politique est azimutée dans toutes les directions, sauf dans celle de l'intérêt commun.
Alors, voici ma tyrannie, celle de l'État de droit et du progrès au service des hommes.
Commentaires
Enregistrer un commentaire