N’enseignez pas en fac de droit (hors Paris intra-muros et quelques classes de province)
N'enseignez pas en fac de droit.
Vous ne croiserez le regard que de 2 à 3 intelligences, tandis que vous ferez face à 25 merlans qui semblent implorer que vous les remettiez dans l'eau.
Vous ferez face à de fantastiques paresseux, qui ne rêveront, tout le cours durant, que de regagner leur branche, soit que ces marsupiaux sont las de leur existence, à cause du nihilisme propagé par les écrans ; soit qu'ils sont trop peu lettrés pour comprendre au moins 9 mots sur 10 d'une phrase correctement construite.
C'est cela, enseigner en fac de droit, du moins en première année : c'est une pénible mission d'alphabétisation. Alors on aimerait s'enchainer à la grille du portail de l'université, gardé par un agent de sécurité très peu sécurisant, pour militer pour une réforme de l'entrée en licence de droit : contrôle de lecture et de compréhension du français, et obligation de suivre des cours de remise à niveau en cas d'échec.
Exactement comme il y a 10 années.
La renonciation à cette exigence est une véritable capitulation. Et ni les mous fonctionnaires de l'institution, ni les professeurs ne voudront serrer la vis.
Trop attachés à leur petite paix sociale, ils sont très peu résistants aux protestations.
Trop déconnectés d'une réalité qui consterne, ils se contentent de leurs semaines de quatre jours et de leur télétravail du lundi.
Quant aux autres érudits de l'institution, ils préfèrent organiser des colloques sur le féminisme en 1789, et sur l'anthropologie des tatouages des personnes détenues.
Résultat : dans les classes, les braves vacataires sont en première ligne pour ramasser les déferlantes de médiocrité émises par ces petits capos de la post-modernité.
Mais si on s'énerve contre cette cuvée acide de 2025, c'est parce qu'on a connu mieux. On a connu bien plus dynamique, bien plus motivé et bien plus respectueux.
On a connu ces classes de ces gens en "double licence", accessible sur candidature. Ce qui implique de savoir rédiger une lettre, et d'aligner trois phrases cohérentes devant le responsable de la pédagogie. On a connu ces classes qui tapotent à l'unisson chaque mot, chaque donnée, chaque conseil que vous leur donnez. Ceux-là vous jouent la symphonie de 30 claviers et stylos sur-sollicités, avec des regards fixés sur feuilles et écrans, avec une concentration qui engage tout le corps et l'esprit.
Et si vous avez le malheur d'arbitrer des concours de plaidoiries qui réunissent les meilleurs plaideurs de licences de France... C'est comme voir l'Italie (à ce propos) et être contraint de retourner vivre dans le Rif. C'est chiant. C'est aride et ça manque de civilisation. Puisque dans cette Rome des concours d'éloquence, vous rencontrez le fleuron de la jeune communauté des juristes, laquelle produit plus d'énergie que toutes les turbines que cette sale crevure de Macron a vendues (avant de les racheter à un prix, sans doute, prohibitif - ou le cocu sans souffle dans toute sa splendeur). Et pensez bien que ces jeunes engagent toute leur vie dans ces concours, et lorsqu'ils perdent, ils ont l'impression de tout perdre.
C'est ça, l'avenir.
Des jeunes de Clermont, de Saint Étienne, de la Sorbonne et d'ailleurs, qui vont volontairement se confronter à l'extrême violence de la compétition. Une compétition qui rythmeront leur vie, s'ils embrassent une vie exigeante et exaltante. Ce sont des jeunes qui vont acquérir une lucidité, dont l'idéologie tutélaire et grossière de certains tend à leur en priver. Ce sont des jeunes qui ont le sens de l'hiérarchie, qui respectent les titres, qui savent exprimer des salutations, évitant de cette façon de paraitre aussi primaux qu'un sous-prolo alcoolique du Nord de l'Angleterre.
Alors, ne vous engagez pas à être un tuteur pour des majeurs incapables et infoutus de signer une fiche d'assuidité, malgré l'injonction exprès qui y figure. Ne soyez pas la police administrative de leur assuidité. Ne soyez pas non plus la police répressive de leurs lacunes et de leur choix trop ambitieux d'un parcours qui consiste à lire plus de 30 minutes par jour.
Envoyez donc se faire foutre ce petit monde, ces étudiants majeurs, ces charges pour la société, et tous ces professeurs complices et malvoyants par choix.
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